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Miss ou “Missed” Cameroun

Le 07 Août 2013 à Yaoundé, l’édition 2013 de l’élection de la plus belle fille du Cameroun a livré son palmarès. Sur les 20 candidates en lice, une a été désignée par le jury et par le public de votants comme le nouveau visage de la beauté à la camerounaise ; il s’agit de Mlle AYENA Denise Valérie, 22 ans, 1.80m, étudiante en 3ème année communication d’entreprise.

Cette jeune demoiselle est (de l’avis de ceux qui l’ont élue en tout cas) celle qui mérite le plus de promouvoir les valeurs culturelles camerounaises, en portant haut les couleurs du Cameroun lors des concours (Miss Monde entre autres) et autres évènements internationaux, celle qui,  de par son aura pourra drainer l’attention du public sur les causes qu’elle aura à défendre,  mais aussi et surtout, celle qui remplit au mieux les critères retenus par le COMICA (Comité Miss Cameroun) à savoir :

 Être de bonne moralité (profil psychologique favorable),

 Savoir s’exprimer en langue locale, en français et anglais,

– Être scolarisée,

– Avoir une bonne présentation physique (cheveux, ongles, peau…),

– Avoir une bonne élocution,

– Être naturelle (cheveux, ongles, sans décapage), pour ne citer que ceux-là…

En dehors de sa carrière de mannequin international, cette élection lui ouvre un vaste champ de possibilités sur le plan professionnel; d’ailleurs, cette carrière est un atout pour elle dans l’accomplissement de la tâche qui lui incombe, puisqu’on peut penser que bénéficiant du « stamp of approval »  des grands designers internationaux, attirer l’attention du monde sur les fléaux qui minent la société camerounaise devra être assez facile (ça c’est pour ceux qui choisissent de voir le verre à moitié plein).

Pour nous autres qui souffrons de cette malformation si particulière de l’esprit,  qui consiste à ne jamais voir le verre qu’à moitié vide, il ne nous a pas échappé que les mensurations de notre Miss sont (à en juger par son apparence en tout cas),  semblables à celle d’une miss occidentale. Ce qui nous a interpelé  d’autant plus que l’image que nous avons de la femme camerounaise est toute autre ! La femme camerounaise est bien connue pour ses formes généreuses, d’ailleurs c’est ce qui frappe en premier les étrangers qui débarquent chez nous, l’un d’entre eux M. DAGO (Ivoirien) n’hésite pas à le rappeler tout le temps : « Ah Yaoundé ! Y’a femmes on dirait Guitares ! ».Si la femme camerounaise est donc exaltée pour ses formes généreuses, d’où vient-il que les miss, c’est-à-dire ces jeunes filles qui sont censées incarner l’idéal de beauté Camerounais soient si fines, on a presqu’envie de dire si plates, si minces ?

Nous pourrions ainsi nous lancer dans un questionnement sans fin, et à vrai dire inutile, ce qui compte à notre sens c’est de comprendre ce qu’on peut lire en filigrane derrière cette élection, et quelles sont les implications sur l’image de la femme camerounaise. Tout d’abord, notons que cette  tendance à l’exaltation de la maigreur et des faciès occidentaux, remonte chez nous,  au début des années 2000, (En contre bas les photos des miss Cameroun 2002 et 2008) :

Miss Cameroun 2002

Miss Cameroun 2002

Miss Cameroun 2008

Miss Cameroun 2008

Ensuite, rappelons au passage que cette tendance à l’occidentalisation des critères de beauté, n’est pas l’apanage des seuls camerounais, mais plus des pays d’expression francophone (héritage du colon français ?) ; la preuve en a été donnée le soir même de cette élection avec la Miss Côte d’Ivoire (métisse) qui était présente à l’évènement. (En contre bas une photo de Miss Côte d’Ivoire 2013) ;

Miss Côte d’Ivoire 2013

Miss Côte d’Ivoire 2013

Alors, peut-être que l’ambition des organisateurs de l’élection Miss Cameroun depuis quelques années, est tout simplement d’élire la miss qui aurait le plus de chance de remporter d’autres concours sur le plan international (par exemple Miss Monde !), peut-être que tout cela cache des ambitions bien plus nobles, et des considérations qui échappent à nos esprits à priori très étroits ; mais la femme camerounaise en avait-elle réellement besoin ? Elle qui est constamment inondée de publicité sur les produits décapants,  elle qui est tous les jours exposée à la propagande des modes de vie des stars occidentales (rapidement érigées en modèles) avec les conséquences que nous observons tous : la gymnastique capillaire d’une RIHANNA est ça et là suivie avec beaucoup d’intérêt et copiée, tout comme la dépigmentation d’une NICKI MINAJ en inspire certaines, … à tel point que les seules artistes camerounaises qui « font le poids », et auxquelles les camerounaises aiment bien s’identifier sont très souvent celles qui se rapprochent le plus de ces modèles importés (extensions capillaires, dépigmentation de la peau, lentilles, etc.) *Clin d’œil à LADY PONCE *.

Vous l’aurez donc compris, ce qui se cache derrière tout cela c’est un processus de déstructuration de l’identité de la femme camerounaise et partant africaine, qui  agit lentement dans notre pays comme ailleurs en Afrique, et ce qu’il  apporte comme information c’est que le spectre de la colonisation est toujours présent dans l’esprit des africains, les cicatrices laissées par l’assimilation culturelle dont les africains ont fait l’objet,  n’ont surement pas encore tout à fait disparues.

Ce qu’il faut retenir c’est que si l’on veut bien se donner la peine de penser un tout petit peu, cette élection de Miss Cameroun, nous apporte bien plus d’informations que juste de savoir qui est la plus belle fille du Cameroun ; maintenant, ce qui serait tout aussi pertinent c’est de savoir comment cette élection a été perçue par les principales concernées : les femmes camerounaises! Il serait curieux de savoir si notre miss fait l’unanimité auprès de ses compatriotes de la gente féminine.

Au final, quoiqu’on puisse dire, force est tout de même de reconnaître des mois plus tard que le COMICA a atteint l’objectif qu’il s’était fixé, à savoir hisser très haut les couleurs de la beauté camerounaise ;  puisque notre AYENA Denise Valérie nationale a fièrement représenté notre pays au concours international Miss Monde qui s’est tenu du 7 au 28 Septembre 2013 à Bali (Indonésie) où elle a fini dans le top 10 en finale,  avant de voir la couronne atterrir sur la tête de Miss Philippines (nous vous ferons l’économie de son nom…). Alors on a beau décrié les méthodes du COMICA et toute l’idéologie qui se cache derrière tout cela, mais peut-être que finalement lui seul connait la recette gagnante, peut-être aussi que finalement, tous les moyens sont bons pourvus qu’ils mènent aux résultats attendus…

Photo Source: beautypageantnews

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