Yaoundé

Mais qui est donc l’ordure ?

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Photo source: Scaff237

Yaoundé, ou Ongola pour les puristes, la ville aux sept collines, la majestueuse capitale (politique) de notre cher Cameroun. On dit souvent de ses habitants qu’ils sont décomplexés, qu’ils croquent la vie à pleine dents. Faisant un tour dans les rues de la capitale, on peut confirmer la véracité de cette assertion. Les yaoundéens sont effectivement décomplexés. Tellement même, qu’une grande partie d’entre eux en ont jeté toutes leurs notions d’hygiène aux oubliettes (accordons leur le bénéfice du doute, et partons du principe qu’ils ont lesdites notions).

Une personne ignorant des réalités locales, pourrait s’étonner de tous ces dépôts d’ordures qui s’improvisent un peu partout dans nos quartiers. Et que dire alors, de ces cours d’eau qui se métamorphosent en “cours de détritus”, tellement les populations y jettent allègrement leurs déchets: bouteilles usagées, préservatifs usités, emballages plastiques divers, etc. etc. ? Posez donc la question aux intéressés,  on vous répondra à quelques mots près : « il y’a quoi ? La saleté ne tue pas l’homme noir  » Puis on vous demandera d’attendre un moment, votre interlocuteur ayant besoin d’aller vider sa vessie…sur le mur le plus proche. Ne vous demandez plus pourquoi les panneaux portant la mention « interdiction formelle de pisser ici » ou « interdit de jeter les ordures ici » pullulent autant dans la ville. Les populations ont pris l’habitude de se débarrasser de leurs déchets (aussi bien organiques que ménagers) un peu partout, selon leurs envies et leurs humeurs. Les infortunés propriétaires des endroits  visés, essayent tant bien que mal d’endiguer le flot, avec des menaces de poursuites judiciaires et d’amendes. Mais comme le dit une autre assertion qui court dans les rues de la ville : « le Camerounais n’a peur de rien ».

Oui, le Camerounais n’a peur de rien. En fait, il se soucie de peu de chose. Parlons de ce passant, qui sans aucune gêne, se racle la gorge et en expectore tout le contenu sur la chaussée. Malheur à vous, si vous essayiez de le dépasser à ce moment là. Peu de chance que ce soit un chef traditionnel, qui vous aura involontairement béni (si vous croyez à ces pratiques traditionalistes). Non, ce sera juste un individu lambda qui vous aura craché dessus. Et que dire alors, de ce taximan, qui se régale d’arachides tout en conduisant ? Il est tout à fait possible de le suivre sur des mètres, étant donné qu’il jette les gousses par la fenêtre, au fur et à mesure qu’il les dépouille de leurs graines. Et non, il n’essaie pas de reproduire Hansel et Gretel. C’est juste que la propreté des rues l’indiffère fortement. Les passagers  à l’arrière ne font guère mieux. Regardez cette dame qui finit de déguster une orange, et qui en balance négligemment les pelures, pépins et autres  par la fenêtre. Si vous les interrogez, ils répondront crânement, à quelques mots près : « Il faut bien qu’Hysacam ai du travail. On ne va pas les payer à ne rien faire. »

Dépassant même le simple concept d’hygiène, le véritable problème qui se pose ici est celui de l’incivisme des habitants de Yaoundé. Il est vrai que les pouvoirs publics se démarquent de leur côté par un laisser-aller et  une léthargie inexplicable. Il existe encore des quartiers à Yaoundé, où on peut parcourir plusieurs mètres sans entrevoir la moindre poubelle. Comment en vouloir alors aux populations, de créer leurs propres zones de dépôt ?  Par ailleurs, on se souvient à peine de quelques véritables campagnes de communication, pour sensibiliser l’opinion publique. Hormis le mémorable « c’est qui l’ordure ? » on se perd dans des dizaines de conférences, symposiums, et autres ateliers théoriques et sophistes. Aucune véritable mise en application dans la vie de tous les jours. L’expérience a pourtant prouvé que la théorie n’est d’aucune véritable utilité. Par exemple, la plupart des personnes qui salissent actuellement nos rues ont toutes reçues des cours d’Education Civique durant leur parcours scolaire, du primaire au secondaire. On se demande alors s’il ne serait pas temps d’instaurer une force répressive, chargée exclusivement de réprimer ces manquements aux règles élémentaires de la vie civique.

Paradoxalement, ces personnes qui salissent à tout-va, sont souvent les premières à critiquer. Prenez le taximan qui parsème la chaussée de gousses d’arachide. Il met un point d’honneur à entretenir chacun de ses clients sur tout ce qui selon lui, ne « va pas » dans le pays, et tous ces manquements sont bien sûr à imputer à notre gouvernement. On a envie de lui rappeler que le progrès commence par les petits détails, et que chacun doit apporter sa pierre à l’édifice de la construction de notre cher pays. Des rues propres seraient un bon début. De plus, les peuples n’ont que les dirigeants qu’ils méritent (après tout, ce sont eux qui les produisent). A peuple désordonné et incivique…gouvernement désordonné et incivique.  Comme on fait son lit…

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