Fête de la Jeunesse

La théorie du décalage

La veille de la 48ème édition de la fête de la jeunesse nous avons eu droit au traditionnel discours du Chef de l’Etat non pas à la nation, mais plutôt à la jeunesse camerounaise. Seulement… Est-elle intéressée encore, quand  90 pour cent de la population active est dans le secteur informel, par les dires du Président ?

Ce qu’on peut reprocher au PRC, c’est évidement d’avancer à pas feutrés et nos cadets  semblent très souvent ne pas trop comprendre les mises en gardes dites de façon voilée : il est temps de se bouger, la gabegie est finie. Vous voulez une place au soleil ? Allez à l’école, formez-vous tant qu’il est temps. Le deuxième point noir qu’on peut remettre sur la table, c’est LA lenteur administrative. Vous aurez beau parler de millier d’emplois créés dans plusieurs secteurs, il reste que se faire aligner dans la base de données de la fonction publique vous clochardise le temps que l’arrêté du premier ministre sorte et que vous soyez compté parmi les agents de l’Etat, et partant payé. Le meilleur est toujours à venir et nous on continue d’espérer n’en déplaise aux utopistes.

Ce qu’on a retenu en substance de ce discours bref est que la politique gouvernementale de la jeunesse est orientée vers la formation des technocrates. Donc, faites place nette à l’enseignement technique que nous avons tous tendance à mettre au rabais, et pour cause : des enseignants démotivés, une jeunesse préoccupée par le résultat en dépit de tout bon sens – tout chemin mène à Rome, dit-on – en plus de quoi, des infrastructures vétustes : lycées et collèges d’enseignement technique et commercial vétustes ou en création, le technique a de quoi décourager les plus opiniâtres. Mais come on dit, comme on fait son lit, on s’y couche.

Il nous a été servi sur un plateau la théorie de la normalisation. Là, il faut faire très attention, car il s’agit de lire entre les lignes. Sous les propos doucereux de Son Excellence, une mise en garde veille : elle est finie, l’ère de la facilité dans laquelle s’est enlisée la fonction publique. Il faut faire place nette à la méritocratie. La tâche est bien ardue pour les personnes mal avisées et surtout mal renseignées : le changement est là, chacun doit affuter ses armes pour parer au plus pressé et se faire une « place au soleil ». Ne vous y trompez pas. Tout juste après le discours que les gens ont suivi d’une oreille plus ou moins distraite, les commentaires allaient bon train. Les conducteurs de moto- taxi sont revenus sur le devant de la scène. De quoi être jaloux, n’est-ce pas ? Il ne faut pas, car nous on espère que cela mettra fin aux chauffards fous qui slaloment dans les embouteillages…

Le comble est que tout est cohérent au final. Les JCD, entendez « Jeunes Cadres Dynamiques » en ont à revendre et ne veulent qu’une chose : faire leurs preuves. Le ministère qu’on peut citer en exemple dans ce cadre est notamment le Contrôle Supérieur d’Etat qui dirige de façon efficace la fameuse opération « épervier ». Pour ceux qui sont passés à la commission de redressement budgétaire, il en a été pour leurs frais. « Ça ne blague pas », comme on dit au pays. Les nominations s’y font par petites doses, car si on veut vivre heureux, on vit caché. Personne n’ignore ce dicton. De toute évidence, l’opération « épervier » continue, en sourdine : les responsables d’université d’Etat en savent quelque chose ces derniers temps. C’est fini, le décalage. Ce manque d’inadéquation entre les dires du PRC et les réalités du terrain.

Comments



There are no comments

Add yours

What moves you?